Saint-Pons-de-Thomières et le Pays Saint-Ponais
Histoire et patrimoine de l'ouest du département de l'Hérault

Géographie de la région des Verreries-de-Moussans :
La population - démographie

Extrait de : "La géographie et les divisons administratives de Moussans - démographie"
"Les verreries forestières de Moussans" (1450-1890) par Francis de RIOLS de FONCLARE - 1925 (voir le sommaire).

"L'industrie ne peut se développer qu'à deux conditions :
1) Avoir une région environnante assez riche pour alimenter à bon compte la population.
2) Avoir une population assez dense, pour y recruter la main d'œuvre nécessaire, sans priver l'agriculture des bras nécessaires pour l'entretien et des cultivateurs et des ouvriers d'usine.


Ouvriers verriers au travail

Un certain équilibre est nécessaire entre la population rurale produisant les denrées nécessaires à la vie, et la population urbaine qui consomme les dites denrées sans les produire.

"C'est le ventre dit-on, qui guide l'humanité". Sans entrer dans le sens trop matérialiste de cet adage, nous devons bien conclure que ce ne sont pas l'étoffe, ni les souliers, ni les machines ou instruments si perfectionnés soient-ils qui nourrissent les hommes, car sans nier le progrès, on peut se rendre compte que les instruments simples, les étoffes, furent longtemps du domaine de l'industrie familiale, par conséquent, ils ne nécessitaient pas uns pléthore d'ouvriers d'usine ; la rupture de l'équilibre entre producteurs de denrées agricoles et consommateurs des dites denrées (quand bien même ces derniers seraient producteurs d'instruments ou d'autres matières) provoque un enchérissement sur les produits du sol.

Supposons deux paysans apportant leurs denrées au marché pour les vendre, et un ouvrier seulement pour les acheter ; la loi de l'offre et de la demande prévaut aussitôt et l'ouvrier peut acheter à bon compte les denrées qui lui sont nécessaires : les deux paysans ont eu un petit bénéfice et de plus ils ont retiré le nécessaire à l'entretien de leurs familles.
Si au contraire, deux ouvriers se présentent au marché pour acheter les denrées produites par un seul paysan, les rôles sont renversés et les prix des denrées vont au moins doubler ;
La somme d'utilités apportées par un seul paysan ne pourra satisfaire pleinement les désirs des deux ouvriers, et cependant par leur concurrence, les prix auront haussé.
De ce fait, ils vont réclamer une hausse de salaire qui leur procurera un bien-être momentané ; mais les produits manufacturés suivront aussitôt le mouvement de hausse et cela ne fera pas apporter un sac de blé de plus ni un muid de vin de plus sur le marché : lesbesoins ne seront que partiellement satisfaits, malgré les salaires élevés ;
La véritable cause initiale de la cherté de la vie est la pléthore des ouvriers d'usines et la pénurie des ouvriers agricoles, pénurie qui raréfie les denrées nécessaires à l'existence .

Que s'est-il passé aux Verreries-de-Moussans, pour que la population ait tant diminué par rapport au début du 19ème siècle, et à la fin du 18ème ?

En plus des causes générales, que nous n'avons pas à étudier ici : telles que l'attrait que les grands centres exercent sur les jeunes gens un peu déracinés par le service militaire, et souvent détournés des travaux agricoles par une instruction primaire mal comprise et mal adaptée aux milieux ; il y a d'autres causes qui sont d'apparence secondaire :

- C'est d'abord la pauvreté des terrains cultivables, obligeant chacun à ne cultiver son bien qu'au vue de ses besoins exclusifs .
Ce défaut de surproduction de denrées agricoles empêchait les verreries forestières de se développer : elles travaillaient pendant l'hiver et dès que les premiers jours du printemps arrivaient, les verriers abandonnaient leurs travaux, pour se consacrer à ceux du sol, soit directement ou indirectement .
Pendant longtemps, cette pénurie de denrées d'entretien fut la cause de stagnation de ces verreries . Ce n'est pas la durée du four qui guidait ces interruptions de travail, car nous verrons plus loin, quel était le nombre de ces petites verreries : plusieurs fours appartenaient au même propriétaire, ils étaient disséminés, selon l'état des coupes de bois, et il était aisé de faire le travail du verre en passant de l'un à l'autre pendant les réparations, sans avoir à craindre les prescriptions du Roi, s'opposant à de trop longues campagnes, qui dans la région Moussonaise restaient lettres mortes .

- La transformation de l'industrie verrière d'abord familiale en travail de manufacture est une autre cause de dépopulation .


Verrerie industrielle de Carmaux

La production en série exigeait plus de capitaux, plus de main d'œuvre nécessaire pour la transformation des usines : après quelques temps de travail restreint, les fours s'éteignirent les uns après les autres . Chacun prit sa route, et la plupart des familles de verriers abandonnèrent définitivement le pays natal.
Le mauvais état des routes rendait fort difficile l'approvisionnement en matières premières et l'écoulement des marchandises fabriquées .


Filature de Labastide-Rouairoux

- La dernière cause qui est actuellement la plus récente et qui est même actuelle [nous sommes en 1925] est la naissance du centre ouvrier de Labastide-Rouairoux , qui absorbe la plupart des jeunes hommes qui pouvaient utilement cultiver le pays . Les métiers de tissage travaillent à plein rendement, les charrettes pliant sous le poids des balles de drap sillonnent les routes, mais la campagne environnante agonise, et la cherté de vie va s'accentuant .

- On peut signaler en dernier lieu, comme cause de dépopulation, l'attrait des pays de vignobles sur les paysans cultivant un sol ingrat, se figurant que la monoculture est un idéal .

Nous ne pouvons que relever respectueusement, les familles qui malgré les causes citées plus haut sont demeurées fidèles au sol ancestral, et empêchant encore le pays de devenir désert .

Sur les 156 maisons qui constituaient l'agglomération de la paroisse des Verreries-de-Moussans au début du 19ème siècle, combien sont encore debout ? Une promenade dans le chef-lieu montrera maintes maisons complètement démolies, et la plupart fort lézardées.
Voici les résultats des recensements de la population de la commune :

En 1866 …………… 722 habitants
En 1872 …………… 632 habitants
En 1876 …………… 570 habitants
En 1881 …………… 513 habitants
En 1886 …………… 435 habitants
En 1891 …………… 519 habitants
En 1901 …………… 431 habitants
En 1906 …………… 350 habitants
En 1921 …………… 268 habitants"

Francis de Riols de Fonclare


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