Les moyens et les modes de productions - historique :

Extrait de : "Les verreries forestières de Moussans" (1450-1890) par Francis de RIOLS de FONCLARE - 1925 (voir le sommaire). ("Les moyens et les modes de productions") "Avant d'entrer dans le vif du sujet, nous tenons à rappeler ci-dessous succinctement d'ailleurs, la question de l'origine du verre. Cette question est des plus discutée. L'origine du verre remonte à la plus haute antiquité, les recherches géologiques l'attestent par des témoignages irréfutables. L'Egypte semble avoir été le berceau de la fabrication du verre, l'Assyrie l'aurait connue ensuite et enfin la Phénicie. Les Phéniciens, véritables rouliers des mers ont contribué à développer l'industrie du verre au cours de leurs vastes et lointains voyages. D'après l'opinion de M. J. Henrivaux, dans son savant et intéressant ouvrage, les premiers briquetiers ont été probablement les premiers verriers, des verriers sans le savoir naturellement. Quel qu'ait pu être d'ailleurs le délai mis par le temps entre la découverte toute fortuite de ce produit nouveau et sa fabrication plus ou moins raisonnée, avec des produits spéciaux, le verre n'a pas, semble-t-il, d'autre origine. Longtemps, la production du verre s'est limitée aux objets de toilette ou ornementaux : grains de collier, pendants d'oreille, bagues. Les Phéniciens transportaient aux Ethiopiens sous le nom de pierres d'Egypte des perles en verre multicolores. Les Gaulois eux-mêmes, s'ils ne connaissaient pas encore la fabrication du verre, ont connu les bijoux en verre coloré, comme le prouvent des granis coloriés en bleu, trouvés sous des dolmens dans la Lozère. Des trouvailles semblables ont été faites en Belgique, en Allemagne, en Hongrie et au Danemark. Les Egyptiens ont même connu le soufflage du verre, car les peintures des hypogées de Beni-Hassan (province de Minyeh), reproduisent les diverses phases de la fabrication : Deux verriers sont représentés assis devant des brasiers allumés, soufflant avec leur canne aux lèvres l'un un vase, l'autre un manchon cylindrique. D'après Pline, les Phéniciens de la ville de Sidon avaient inventé les miroirs de verre. Mais le grand mérite de ce peuple fut de substituer aux soudes imparfaites obtenues par la combustion de certaines plantes marines, l'alcali minéral : le sel de nitre, le fondant par excellence. Les verreries de Tyr n'ont pas eu la même renommée que celles de Sidon. Aux environs du village actuel de Saur, on a trouvé de nombreuses traces d'anciens fours de fusion, des débris de poteries et des débris de verres colorés, dénotant l'existence d'anciennes verreries. Les Romains imitant avec tant de succès les arts étrangers assimilèrent vite l'industrie verrière. Les principaux centres verriers étaient ceux de Rome et de Côme. Le sable de Rome d'après Strabon, était renommé pour ses propriétés vitrifiables. Les Romains faisaient des coupes en verre extra-blanc, et même les fouilles d'Herculanum et de Pompéi, ont révélé l'existence de vitres, d'assez grandes dimensions. Un indice du développement de l'industrie verrière à Rome, fut l'impôt fort lourd que l'empereur Alexandre Sévère, institua sur les verriers, comme patente. Cet impôt fut ensuite, il est vrai rapporté sous Constantin. L'usage du verre était fort répandu dans les lieux publics, les cabarets, les maisons des pratriciens. Après la conquête de la Gaule, par Jules César, la verrerie y fut importée. Il y a des ruines de verreries gallo-romaines à Rouen, à Amiens, Rennes, Bordeaux, Autun, Lyon , Nîmes, et Strasbourg. Les Gallo-Romains ont surtout excellé dans la fabrication de mosaïques en verres colorées; dans les tombeaux de l'époque on découvre de nombreux flacons à base carrée. Malgré les grandes invasions, cette industrie se maintint en France, comme le prouve la lettre écrite par l'évêque Fortunaut à la reine Radegonde (femme de Clotaire 1er), d'après laquelle, à cette époque, les viandes étaient servies sur des plats d'argent, et les légumes sur des plats de verre. Pendant le Moyen-Age, les verriers s'établissent dans les forêts, loin des villes tant pour se procurer le bois nécessaire au chauffage, que pour échapper à la réglementation et au fisc. Des documents authentiques, dit M. Henrivaux, démontrent l'existence de vingt-cinq fabriques de verre en activité sur notre pays entre 1207 et 1497. La pièce la plus ancienne est un diplôme de l'an 825 qui mentionne le port de la verrerie dépendant de St-Mesmin. Les inventaires des Maisons Royales en 1360 et 1380, indiquent que la plus grande partie des verres en usage en France, viennent d'Orient. On peut dire que la verrerie de luxe est d'origine étrangère, soit d'orient, soit de Venise, tandis que la verrerie ordinaire était fabriquée dans notre pays. La vaisselle de verre était à un bas pris, car la plupart des riches marchands de l'époque dédaignaient d'en faire usage et avaient coutume de boire dans des coupes d'argent et de vermeil; les récipients en verre étaient réservés à l'office. Legrand d'Aussy, dans "l'histoire privée des Français" nous révèle l'existence d'une charte de 1338, par laquelle Humbert II, dauphin du Viennois, accorde à un verrier nommé Guionnet le privilège de l'exploitation d'une partie de la forêt de Chamborant. La verrerie artistique reparut au 16ème siècle, quand les gentilshommes verriers essayèrent d'imiter, avec succès d'ailleurs, les objets fabriqués dans les verreries de Murano. Ceci brièvement exposé, nous allons nous occuper dans le chapitre suivant des moyens et des modes de production des verreries de Moussans. " Francis de Riols de Fonclare