"Au mois d'octobre 1685, Louis XIV signe à Fontainebleau l'édit portant révocation de l'Edit de Nantes octroyé en
1598 ; "ensemble les articles particuliers arrestés le 2 may en suivant ; lettres patentes expédiées sur iceux l'édit
donné à Nîmes au mois de juillet 1629 et les concessions faites en conséquence, en faveur de la R.P.R".
Cet édit fur enregistré le 27 octobre 1685, à la cour des comptes aides et finances de Montpellier. Lecture en fut faite
le même jour, les chambres assemblées, en présence du duc de Noailles à la tête de la compagnie, et du sieur comte de
Roule, lieutenant général pour le roi au pays de Vivarais.
Révocation de l'Edit de Nantes
Dès que les ministres protestants eurent connaissance de ces nouvelles mesures, ils réclamèrent leur passeport pour quitter le diocèse de Saint-Pons.
Jacques Houlez, ministre à Anglès, demande à sortir par Bordeaux pour se réfugier en Angleterre avec Renée Maurel, sa
femme. Jean Lamotte, ministre de Labastide-Rouayroux, se dirige sur Genève, par Lyon, avec sa femme Olympe Audibert, et
deux filles, l'une âgée de deux ans neuf mois et l'autre de un mois et demi "avec une nourrice pour allaiter, comme
il résulte de l'attestaire du lieutenant criminel de Castres".
La fureur religieuse de ces populations surchauffées par les édits royaux et le personnel administratif s'acharne
sur les biens des consistoires et se livre à des actes regrettables.
Nous signalons les faits suivants, car ils se sont produits dans le voisinage de Moussans.
A Anglès, le temple fut abattu et complètement rasé, le cimetière fut affermé pour le prix de quatre
livres distribuées aux pauvres, la cloche du temple, brisée lors de la chute du clocher, fut abandonnée au ministre
pour qu'il se dédommage d'une année de gages.
Destruction d'un temple
Les pierres provenant de la démolition du temple furent employées à clôturer le cimetière de la paroisse et à paver
une rue devant l'église . Les portes, les fenêtres, les pierres de taille furent employées à la construction de
l'église rurale de Saint-Martin d'Uscladelles près Anglès . La chaire, les bancs et quelques poutres furent
transportés à l'église où ils servirent à agrandir la maison presbytérale .
Temple actuel de Labastide-Rouairoux
A Labastide-Rouairoux, le temple fut complètement rasé : la chaire, les bancs et quelques autres sièges furent
transportés dans l'église des Verreries-de-Moussans
(village appelé à cette époque Fon de l'Estat); les balustrades furent placées dans l'église de Labastide .
Le couvert et les pierres provenant de la démolition du temple servirent à agrandir le presbytère.
Une colonne qui soutenait la galerie du temple fut employée à faire une croix;
"Le reste des matériaux n'étant pas de grande valeur furent pris par ceux qui en voulurent".
Une ordonnance de M. de Basville, de novembre 1685, ordonna aux
"anciens syndics, greffiers, et escrives des consistoires supprimés de la R.P.R. de représenter les
titres des biens de ces consistoires".
Le 16 février 1686, le juge de la ville Antoine Gayraud fut commis pour recevoir cette déclaration et le 9 mars suivant,
assisté de son greffier, Jean-Jacques Pagès, notaire à
Saint-Pons, fit assigner les anciens greffiers du Consistoire, à
Labastide, dans la demeure d'un sieur Calas, sous l'enseigne du "Lyon d'or". Le 22 février 1686, les sieurs Jean Saïs, sieur de Campan; Pierre de Riols, sieur de Fonclare; Cabriès; Mathieu Calas, Hélie Benoist, Mathieu Vialet, Pierre Mainadier, Houlès, Moyse Rouanet, Pierre Besnoit et Pierre Lignon tirent leur déclaration après avoir promis de dire la vérité "la main mise l'une sur l'autre sur les Saints Evangiles de Notre-Seigneur".
Le 23 février 1686, ce fut le tour des membres du Consistoire d'Anglès : Charles Mascarenc de Rayssac, Cabrol,
Jean Alquier, Jean Gudados, Pierre Fabre, Pierre Bonnett, Pierre Savaric, Jean Houlès, sieur de la Fontésié, vinrent
déclarer la situation financière de leur Consistoire.
Le personnel administratif essayait de convertir les religionnaires par les dragonnades. L'évêque de Saint-Pons, au contraire essayait la persuasion par une armée de missionnaires dont il était le plus actif. Il employa des oratoriens et des séculiers, mais pas des jésuites, au grand déplaisir du Père La Chaise.
Les changements rapides de religion inquiétaient
Mgr de Montgaillard, car les
conversions ainsi faites lui semblaient, avec justes raisons plus intéressées que sincères. Il opposa toutes ses forces et toute son énergie aux mesures violentes que l'autorité royale et les autorités provinciales ordonnaient à l'égard des nouveaux convertis pour imposer des communions forcées. Il écrivit plusieurs fois à ce sujet à M. le comte d'Husson, commandant les forces militaires en Languedoc.
Cette opposition de M. de Saint-Pons commença à émouvoir le pouvoir royal, le 11 décembre 1685, Louvois écrivait à M. de Basville : "Le Roy a esté adverti que M. l'évêque de Saint-Pons n'a point voulu se servir de troupes pour obliger les religionnaires de son diocèse à se convertir".
"Sa Majesté aura bien agréable que vous me mettiez en estat de lui rendre compte de la vérité de cet advis et du nombre des religionnaires qui restent dans ce diocèse".
Le 26 janvier 1686, une lettre de Louvois ordonne de mettre en prison le curé d'Anglès qui " a eu de la complaisance
pour les religionnaires".
Après une série …
Dragonnades dans les Cévennes :
"Nouveaux missionère envoyez par ordre de Louis Le Grand"
Les compagnies de dragons de MM. de Caffignol et de Savigny sont logées dans la communauté. En 1690, il y avait encore,
à Anglès, les officiers de la Compagnie et les mestres de camp du régiment de Mouban.
La situation était délicate vis-à-vis des religionnaires qui avaient abjuré publiquement et qui cependant ne prenaient aucune part aux exercices de la religion catholique.
Louis XIV fit consulter l'évêque de Saint-Pons, à ce sujet, le 12 juillet 1698 .
L'avis de Mgr de Montgaillard se résume en ceci :
1) Pas de contrainte pour la fréquentation des sacrements et l'assistance à la messe;
2) Obligation d'assister aux instructions faites par des prêtres de vie irréprochable, devant user de la persuasion et de la douceur.
La Cour de Rome paraissait favorable à l'évêque de Saint-Pons, car le Pape voyait à contrecœur les persécutions exercées contre les religionnaires par un roi gallican, et ce ne fut que le 27 avril 1701, à la suite d'intrigues, que la censure fut prononcée contre les ouvrages de Mgr de Montgaillard.
Voilà comment, dans le diocèse de Saint-Pons, les rigueurs des dragonnades furent atténuées le plus possible, grâce à la fermeté, à l'élévation des idées, à la bonté de Mgr de Montgaillard, évêque de Saint-Pons.
" Francis de Riols de Fonclare |