"Il n'est pas inutile, selon nous, de nous occuper de la géologie de cette contrée sans entrer cependant
dans trop de détails techniques.
Les industries se développent plus ou moins, selon les facilités de communications et les facilités d'approvisionnements en matières premières.
On peut dire que la nature du terrain est une cause déterminante de la création d'industries.
Le village des Verreries-de-Moussans, au coeur des Avants-Monts
Le département actuel de l'Hérault a été découpé au hasard dans la province de Languedoc, sans limites naturelles, ni
aucun caractère d'unité géologique et ethnographique. Il est formé d'une juxtaposition de territoires ayant des différences
géologiques, géographiques et hydrologiques très marquées.
"La rivière de l'Hérault, et mieux encore une ligne divisoire qui, comprenant la partie inférieure de sa vallée, se prolongerait au Nord par la haute vallée de l'Orb, en amont de Saint-Martin sépare deux régions absolument différentes d'aspect et d'origine.
D'un côté à l'ouest, dans les arrondissements de Béziers et de Saint-Pons, le sol s'étage en terrasses successives orientées parallèlement au littoral, dont l'ossature principale dans la région des montagnes, appartient aux terrains géologiques de l'âge le plus ancien, granites, schistes et terrains houillers.
De l'autre côté, à l'est, dans les arrondissements de Montpellier et de Lodève, ces terrains anciens, sauf dans un petit fond de cuvette, au voisinage de Lodève, font absolument défaut et sont remplacés par de vastes plateaux de calcaire jurassique, de formation secondaire qui, eux-mêmes, manquent dans la région occidentale".
Au point de vue de la succession géologique, ces deux régions jouant en sens inverse des deux côtés de la ligne
divisoire qui les sépare, ont été tour à tour et séparément submergés ou immergés.
Les caractères si opposés dans la constitution géologique et orographique de ces deux régions se retrouvent quant aux productions végétales et aux races animales.
Les populations elles-mêmes ont des traits particuliers de mœurs fortement distinctifs, des nuances de caractères,
d'aptitudes et d'habitudes sociales.
La région occidentale de l'Hérault est celle où la gradation des terrasses est la mieux marquée.
Les terrasses supérieures appartiennent à un vaste massif montagneux confondu dans un même ensemble ; à ce massif,
plusieurs géographes et plusieurs géologues, parmi lesquels il faut citer MM de Rouville et Bergeron, ont étendu le nom de "Montagne Noire".
A vrai dire, il y a en réalité, deux massifs parallèles distincts séparés par une large et profonde dépression servant à l'écoulement du Thoré, du Jaur et de l'Orb.
Le col de la Feuille qui sépare la vallée du Thoré de celle du Jaur se trouvant à plus de 600 mètres en contrebas des
massifs montagneux qui l'encaissent, tandis que son altitude absolue n'est que de 467 mètres, constitue un point de
passage entre le bassin de la Méditerranée et celui de l'Océan.
Les Verreries-de-Moussans, anciennement La Fon de L'Estat, sont à la naissance du Thoré,
qui par l'Agout et le Tarn, se rend à l'Océan.
Paysage des Avants-Monts aux Verreries-de-Moussans
M. Doncieux, pour les massifs plus haut signalés, distingue le massif du Sommail et la chaîne des Avants-Monts
dépasse 1.200 mètres au sud de Saint-Amans et elle se maintient à plus de 1.000 mètres au-dessus de Ferrals.
Voici à titre indicatif, la côte des points les plus élevés :
- route grande communication n°10 d'Anglès à Saint-Pons : col de Cousines 956 mètres.
- route grande communication n°12 de Carcassonne à Saint-Pons : col de Serrières 680 mètres, et col du Prince à la limite du Tarn 756 mètres.
- route d'intérêt commun n°81, de Labastide à La Salvetat, côte de la Matte : 865 mètres.
Ces routes sillonnant dans les sens différents la région Moussanaise, donnent, par leurs côtes les plus élevés
une idée de l'altitude de cette contrée.
Le département de l'Hérault est celui où les diverses formations géologiques se rencontrent avec le plus de régularité et le plus de continuité des temps géologiques les plus reculés à l'époque moderne.
Nous nous sommes inspirés de la carte géologique du département dressé par M. le professeur de Rouville, et de celle
de la région nord-ouest de M. de Bergeron.
Les terrains anciens, savoir : gneiss et micaschistes et terrains primaires, constituent la presque totalité du massif
montagneux désigné sous le nom général de Montagne Noire.
Les roches granitiques qui doivent se trouver en tout lieu à la base de tous les autres terrains constituent le noyau
apparent du massif de la Montagne Noire et plus particulièrement la surface du plateau du Sommail, depuis la frontière
de l'Aude à l'ouest, jusqu'au col de la Mouline, vers l'est.
Massif du Somail : le saut de Vesoles
La série des terrains paléozoïques débute par le Cambrien auquel M. Bergeron assigne trois étages distincts dans la
région qui nous occupe :
- A la base, des grès, qui se rencontrent surtout sur la route allant de Saint-Pons à Saint-Chinian près de Contades, et
dans le fond des ravins de la vallée du Jaur.
- Au milieu, des schistes diversement colorés en rouge, jaune, et vert selon leur âge géologique.
- Au sommet, un ensemble de grès et de schistes.
Ces formations, peut-on dire, occupent la très grande partie de la chaîne des Avants-Monts dans
l'arrondissement de Saint-Pons.
Les formations Dévoniennes sont aussi très développées dans la chaîne des Avants-Monts : elles sont en général calcaires,
parfois dolomitiques, il faut y rattacher les principaux gisements de marbre de Caunes, Saint-Pons, Faugères, etc. ...
Carrière de marbre de Caunes-Minervois
Le terrain carbonifère ou anthracifère se trouve aussi dans la chaîne des Avants-Monts avec des schistes à la base, et des
calcaires au sommet, et il constitue une bande à peu près continue s'étendant de abrières à Félines-Hautpoul, en passant par
Roquessels, Lenthéric et Saint-Nazaire. D'une façon générale, les dépôts schisteux prédominent à l'ouest, et les dépôts
calcaires à l'est.
L'anthracite, combustible antérieur à la houille ne constitue guère que la base des formations houillères de Graissessac.
Quant au terrain houiller, il se compose de deux bassins distincts : celui de Neffiès, qui est d'origine marine, peu
exploité, et celui de Graissessac d'origine lacustre qui de nos jours [en 1925] a pris un grand développement.
Mines de Graissessac
Le terrain Pernien constitue un bassin apparent très étendu traversant les vallées de l'Orb et de l'Ergue entre le bassin
houiller de Graissessac à l'ouest et Saint-Guiraud à l'est.
D'une façon générale, les terrains primaires se rencontrent au nord ouest du département : c'est la région où se trouvent
les Verreries de Moussans.
La série des terrains secondaires qui suit les terrains primaires se trouve surtout dans la partie orientale du département.
Les grès bigarrés, multicolores qui forment la base du Trias se rencontrent aux environs de Lamalou et de Lodève, et sur
quelques points du versant sud des Avants-Monts.
L'assise supérieure de ces terrains est composée d'un grain fin siliceux qui, convenablement pulvérisé, donnait un des
éléments de la composition du verre.
Le terrain Jurassique se subdivise : en lias et ovolithe ou Jurassique proprement dit. Le lias se rencontre aux environs
du petit Causse de Bédarieux. Il se rencontre en outre sur le versant sud de la chaîne des Avants-Monts, dans les ravins
de la Sérane aux environs de Saint-Chinian, où il constitue, entre Bize et Murviel, une série d'îlots de terrains
secondaires, entourés de terrains beaucoup plus récents.
Parmi les terrains tertiaires, dans la région avoisinant Moussans, il faut citer le Garummien : constitué par des marnes
et des roches calcaires plus ou moins imprégnées de fer, leur donnant une couleur caractéristique ; ce terrain se rencontre
entre Saint-Chinian et Cébazan. Dans la même région se rencontre le terrain Nummulitique.
La formation lacustre adossée au Nummulitique et au Garummien se rencontre dans la contrée d'Olonzac, de Montpellier et
même jusqu'à Sommières.
Les autres formations ne se rencontrent pas dans la région qui nous occupe.
Si nous nous rapportons aux sources thermales de cette contrée, d'après leur analyse, on peut déduire la nature des
terrains que ces eaux ont traversées.
"Aucune de ces eaux n'est sulfureuse, et elles paraissent agir surtout par les bicarbonates et autres sels minéraux
qu'elles contiennent à diverses doses, notamment le fer, le cuivre, l'arsenic, la lithine, et parfois même le cobalt,
le nickel, et autres substances, en trop petite quantité pour être constatés par l'analyse directe des eaux, mais qui
se retrouvent parfois en proportion notable dans les sédiments. "
Source thermale à Lamalou - vers 1900
L'analyse générale du groupe des eaux de Lamalou donne : Bicarbonate de soude, de potasse, de lithine, de chaux, de magnésie, de fer, de manganèse, du chlorure de sodium, sulfate de chaux, phosphate de soude, arséniate, borates, sulfate de cuivre, silice, alumine etc. .
"
Francis de Riols de Fonclare |