Pendant les guerres de religion, en juin 1578, le bourg de Saint-Chinian est investi par des troupes protestantes, commandé par le capitaine Pierre Bacon. Originaire de Pierrerue, dont il tient le château, il s'est déjà emparé en 1576 de Cessenon, puis en 1577 de l'abbaye de Fontcaude, qu'il a pillée. La prise de Saint-Chinian survient alors qu'une paix provisoire avait été proclamé entre le roi Henri III et les protestants le 17 septembre 1577 ("paix de Bergerac" qui termine la sixième guerre de religion). Ce n'est qu'en mai 1579, alors qu'un nouveau traîté de paix a été signé trois mois plus tôt, le 28 février 1579 ("paix de Nérac"), que le capitaine Bacon accepte de négocier son départ de Saint-Chinian avec la reine mère Catherine de Médicis, alors à Béziers et en tournée de pacification à travers le royaume . "Malgré la paix officielle, les escarmouches continuent. A la fin de juin [1578], nous apprend l'Histoire Générale du Languedoc, les religionnaires prirent Saint-Chinian-de-la-Corne, où ils tuèrent tous ceux qu'ils rencontrèrent (1). Faurin précise le fait: "Ils sont entrés par un trou où ils avaient mis de la poudre. Estant dedans, ils ont tué tant d'hommes qu'ils ont rencontré (2)." Selon Gaches, "pour contrepeser la perte de Lisle, Bacon prist le dernier de juin, la ville de Saint-Chinian-de-la-Corne. Ayant rempli de poudre la muraille du costé de la rivière, il en fit sauter un grand pan, sur lequel il y avait un corps de garde, dont les soldats furent tués, qui couché sur un coussin, fut porté sur le gravier sans autre mal"(2). Nos sources locales nous auraient sans doute informé de première main, si elles ne faisaient entièrement défaut. Les minutes notariales de saint-Chinian offrent une grande lacune de 1576 à 1582, époque des plus dramatiques de cette seigneurie abbatiale. Cependant dans un enquête contre le sieur Granier, héritier d'un certain Barruel, nous lisons : "Le dict Granier confesse que lors de la prise de Saint-Chinian en l'an 1578, par feu capitaine Bacon, la maison du dict feu Barruel fut renversée avec de la poudre par lesquels ennemis entrèrent" (4). Le 6 juillet Damville écrit au roi: "Le capitaine Bacon et ceux de Thézan massacrèrent les pauvres paysans de tout sexe. Ils ont surpris Saint-Chinian, où ils ont massacré soixante personnes" (5). La paix de Nérac fut publiée le 15 mars 1579. Le 16 mai, Catherine de Médicis revient en Languedoc. Bacon rend Thézan, Saint-Chinian, La Bastide et Cabrières moyennant 800 écus. Il promet de se faire catholique et de dévoiler des secrets très importants à la reine mère. (1) Histoire Générale du Languedoc, XI, p659 (2) Journal de Faurin, p 92 (3) Memoires de J. Gaches, ed. Pradet, p 262 (4) Archives particulières de M. Paul Rey, de Maureilhan (5) Bibliothèque de la ville de Toulouse, C 93 "Le capitaine Bacon", par Jean Segondy, dans les Cahiers de Saint-Pons-de-Thomières