Saint-Pons-de-Thomières et le Pays Saint-Ponais
Histoire et patrimoine de l'ouest du département de l'Hérault

Henri de Treil de Pardailhan
(1832-1886)

Henri de Treil de Pardailhan est né le 13 mai 1832, à Paris, fils de François et Julie Henriette Roze.

Son père François (1801 -1853) , fils d'Alexandre, sous-préfet de Saint-Pons, est l'héritier de la branche cadette des Treil de Pardailhan, et notamment du domaine de La Caunette; François a vainement tenté sous la Restauration de succéder à son père, comme sous-préfet, puis il a été employé au ministère de la guerre.
En 1832, il a épousé Julie Henriette Roze (1808-1833), qui appartient à une famille de la moyenne bourgeoisie parisienne, issue d'un milieu de "soyeux" (fabricants de soie) de Tours : son père, Antoine-Charles Roze, avoué, a été adjoint au maire du 1er arrondissement à Paris. Elle décède en 1833, quelques mois après la naissance d'Henri.

Château de La Caunette
Château de La Caunette

Henri de Treil de Pardailhan a passé son enfance à La Caunette, d'abord élevé par sa grand-mère Marie-Barbe, née Gross, d'origine allemande, qui porte le titre (de "courtoisie") de comtesse de Pardailhan. Dès 1838, son père François se remarie avec Louise-Thérèse Bourguignon de Saint-Martin, dont il aura trois enfants; la famille réside à La Caunette.
A l'âge de 14 ans, en 1846, Henri est envoyé au collège de Pontlevoy (Loir-et-Cher), ancienne Ecole Royale Militaire, préparant le concours d'entrée à Saint-Cyr. Mais trois ans plus tard, alors qu'il atteint l'âge de 17 ans, il abandonne les études et s'engage volontairement dans l'armée, à Arles, au 32ème Régiment d'Infanterie. Il participe d'abord comme simple soldat, puis bientôt sous-officier à l'intervention française en Italie (cette intervention de Louis-Napoléon, Président de la République, puis Empereur, met fin à la République Italienne de Mazzini, restaure le pouvoir du Pape et contribue à aider le roi de Sardaigne, Victor-Emmanuel II, à libérer la Lombardie de l’occupation autrichienne).

En 1854, un an après le décès de son père François, il démissionne de l'armée. Ses demi-frère et demi-soeurs ont renoncé à l'héritage paternel, chargé de dettes; il est le seul héritier de son père, et il faut supposer qu'il cherche durant ses années à gérer ce patrimoine (en 1855, il réside à La Caunette).

En 1857 et 1858, il vend ce qu'il reste du domaine de La Caunette. En 1860, il s'engage comme simple soldat dans le 1er régiment de tirailleurs algériens. Après avoir passé un mois en Algérie, il est envoyé au Sénégal. Quatre mois plus tard, il devient tirailleur sénégalais.

Tirailleurs sénégalais
Officier et tirailleurs sénégalais

Il ne reste simple tirailleur que pendant 10 jours et gravit très rapidement les grades de sous-officier. En 1862, il est sergent-major au bataillon de tirailleurs sénégalais, en détachement au Gabon . Il retrouve à Libreville le missionnaire Jean-Rémi Bessieux, originaire de Vélieux et ancien curé de Minerve, villages voisins de La Caunette.

En 1863, il est nommé sous-lieutenant au 3e régiment d'infanterie de marine, au Sénégal, puis au bataillon de tirailleurs sénégalais, et en 1866 lieutenant de la 4ème compagnie de tirailleurs. En 1867, il est versé à l'état-major des tirailleurs sénégalais, d'abord comme lieutenant puis en 1869, comme capitaine.
Cette affection sans commandement, permet d'utiliser les militaires à des postes d'administrateurs coloniaux : de 1867 à 1869, Henri de Treil de Pardailhan est commandant de cercle, c'est à dire chargé sous les ordres du Gouverneur de Saint-Louis-du-Sénégal, d'administrer un vaste territoire, au nom de la France (le cercle est une circonscription administrative récemment créée en 1859; le Sénégal compte, à cette époque, 12 cercles, regroupés en 3 arrondissements).

Karabane (Sénégal)
Plage de Karabane

Le lieutenant de Treil de Pardailhan est d'abord envoyé à Karabane , sur une île, à l'embouchure du fleuve Casamance, position stratégique. Ce poste n'est occupé que par une dizaine de personnes : le commandant, un caporal, 2 tirailleurs, un commis et un préposé aux douanes, un interprète, et 4 canotiers. L'état sanitaire des hommes est catastrophique, souffrant de paludisme et de troubles intestinaux. Les commandants de cercle se succèdent tous les six mois !
L'année suivante, il est commandant du cercle de Sedhiou (ou Seju), administrant la région de la Casamance . Il siège au Fort Pinet-Laprade, construit une trentaine d'années auparavant, symbolisant la colonisation française (toujours existant à Sedhiou et classé monument historique sénégalais).

Fort Pinet Laprade
Fort Pinet Laprade

La Casamance connaît alors des périodes de troubles, et les colonisateurs contrôlent mal le pays. La gestion au quotidien est toujours difficile, comme l'écrit Henri de Pardailhan :
"Il est difficile de définir la situation politique des populations, car pas une ne subit l'impulsion d'un chef naturel. Chaque chef de village est maître chez lui, et encore ne l'est-il que jusqu'à un certain point, car il est souvent obligé d'en passer par ce que font ou veulent les jeunes ou quelque habitant influent; ce qui fait que ce qui paraît être la vérité aujourd'hui peut être l'erreur demain. de là, les vols, les arrestations des traitants, la séquestration des voyageurs, qui sont presque toujours faits contre la volonté des chefs." (Histoire de la Casamance: conquête et résistance, par Christian Roche)

Tirailleurs sénégalais
Campement en brousse de tirailleurs sénégalais

Le 5 avril 1869, après un séjour en France, Pardailhan est nommé "directeur des affaires politiques" de la colonie, à Saint-Louis-du-Sénégal. En juillet 1869, il participe à l'expédition contre Lat Dior, souverain du royaume de Cayor, opposant à la colonisation, et considéré de nos jours comme un héros national sénégalais. Les Français sont sévèrement battus le 3 juillet 1869, à la bataille de Mekhé, où le lieutenant de Pardailhan est à la tête de "volontaires indigènes de Saint-Louis", sous les ordres du fantasque capitaine Audibert, tué lors des combats. Un mois plus tard, Henri de Pardailhan est fait capitaine.
Le 6 avril 1870, il est décoré de la Légion d'honneur "à la suite d'une campagne au Sénégal dans le Fouta".

La guerre de 1870 provoque son retour en France, après plus de 10 années en Afrique : le 16 novembre 1870, alors qu'il se trouve encore au Sénégal il est nommé capitaine au 3ème régiment d'infanterie de marine, régiment colonial qui se bat pour la première fois sur le sol français. L'Empereur Napoléon III a abdiqué, et l'armée prussienne occupe une partie du territoire.

A son arrivée en France, le 19 janvier 1871, Henri de Treil de Pardailhan passe au 71ème régiment d'infanterie à Cherbourg. L'armistice est signé le 28 janvier 1871, par le gouvernement provisoire, sans qu'il n'ait jamais combattu.
A partir d'avril 1871, le capitaine fait partie avec son régiment de l'Armée de Versailles, chargée de réprimer la Commune de Paris.

Mirail Bellefontaine Toulouse
Tour du château de Bellefontaine - quartier du Mirail, à Toulouse

Le 7 août 1872, Henri de Treil de Pardailhan épouse Cécilia de Mercy-Argenteau, issue de la famille de l'ambassadeur d'Autriche à la cour de France, sous Louis XVI. Les Mercy-Argenteau sont installés depuis quelques années à Toulouse au château de Bellefontaine (actuel quartier du Mirail). L'oncle d'Henri, Armand de Treil de Pardailhan, colonel de gendarmerie à Toulouse, et sa belle-mère Louise, née Bourguignon de Saint-Martin, font partie de la bonne société toulousaine et ont facilité ce mariage.

De cette union est issue une première fille, Berthe-Julie-Armandine-Cécile-Marie, née le 6 mars 1873, décédée en bas-âge, puis un garçon François (1874 -1952) , qui prendra le titre de comte de Pardailhan (marié à Alice Back de Surany), et enfin une fille également prénommée Berthe, née en 1879 (épouse Carles).

Henri de Pardailhan mène, en métropole une carrière classique d'officier d'infanterie, mais doit attendre plus de 8 ans une promotion. Il est nommé chef de bataillon au 57ème régiment d'infanterie, puis passe en 1881 au 57ème régiment. Son dossier militaire mentionne un "officier supérieur intelligent, ayant de la pratique, assez d'instruction, et servant avec zèle - est capable de bien commander son bataillon en toutes circonstances et a du coup d'oeil sur le terrain - pourrait faire un lieutenant-colonel, mais son âge semble devoir limiter ses avancés à son grade actuel."
En 1882, il est indiqué que "la santé de cet officier [est] fortement ébranlée par un long séjour au Sénégal."
Il est fait officier de la Légion d'honneur en 1886, et meurt trois mois plus tard, le 7 août, à Libourne.


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